Les bas-fonds / Nachtasiel

Bruxelles | Théâtre | Théâtre National Wallonie-Bruxelles

Dates
Du 20 au 25 novembre 2018
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre National Wallonie-Bruxelles
Boulevard Emile Jacqmain, 111 1000 Bruxelles
Contact
http://www.theatrenational.be
info@theatrenational.be
+32 2 203 41 55

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Les bas-fonds / Nachtasiel

« On fait ce qu’on peut avec ce qu’on a… c’est à dire pas grand chose ! ». Nachtasiel – en français Les Bas-fonds – est la première et la plus connue des pièces de Maxime Gorki. L’écrivain russe y dessine une galerie de portraits d’exclus dans la Russie prérévolutionnaire. Éclopés, brisés, blessés et réunis au sein d’un asile de nuit à la merci d’un couple de marchands de sommeil, ils tentent de survivre. Jusqu’à l’arrivée d’un vagabond qui leur insuffle, peut-être, un peu d’espoir.

Quatorze acteurs néerlandophones et francophones incarnent aujourd’hui ces marginaux. Le dramaturge Tom Dupont en a adapté le texte après avoir longuement enquêté dans un foyer de sans abris. Nachtasiel dépeint donc sans filtre et sans concession leur condition en posant brutalement la question : comment tolérer une telle pauvreté ?

En exposant la situation de ces déclassés comme une accusation, Raven Ruëll développe une démonstration d’une cruelle actualité : impossible cette fois d’ignorer que dans nos villes, la misère dévore toujours autant de vies humaines sous nos yeux.

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Samedi 24 novembre 2018, par Laure Primerano

Descente au septième cercle

Cela semblerait presque calculé. Alors que le froid hivernal s’abat de plein fouet sur la capitale, Raven Ruëll, accompagné de Tom Dupont à la dramaturgie, présente au Théâtre National son adaptation des Bas-Fonds de Maxime Gorki.

Les Bas-Fonds est la première et la plus célèbre des pièces de Maxime Gorki. Ce père fondateur du réalisme social y dépeint les conditions de vie sordides d’un groupe d’exclus et de marginaux dans la Russie prérévolutionnaire. Avec cette adaptation, le metteur en scène Belge Raven Ruëll décide d’explorer la résonnance de l’œuvre avec l’époque contemporaine. Entre le Russie de 1902 et la Belgique de 2018, le traitement réservé aux pauvres et aux exclus a-t-il vraiment changé ? Le texte original a été remanié, actualisé et enrichi en s’inspirant de séjours passés en immersion dans des asiles de nuit à Gand, Anvers et Bruxelles. Ainsi imprégné d’une réalité toute concrète, Les Bas-Fonds pose un regard perçant et critique sur notre société.

Dans un angle du plateau, un petit abri fait de tôles laisse s’échapper des bribes de conversations. Une caméra s’y faufile, laissant apercevoir une misère ordinaire : celle des pourparlers sans fin avec les agents sociaux, des cris, de la colère et des situations expliquées à demi-mots, entre la crainte et la honte. Il ne faut cependant pas s’y tromper, la vérité se trouve ailleurs. Au centre de la scène, éclairés par une lumière blafarde, des hommes et des femmes se trainent, crachent, saignent, mangent parfois à même le sol. Sans aucune fausse pudeur, l’œuvre expose la réalité crue de la pauvreté et nous laisse seuls avec notre malaise. S’il est tentant, par moments, de détourner le regard, les personnages nous rappellent sans cesse à l’ordre dans un face à face qu’il nous est dorénavant impossible d’ignorer.

C’est que rien ne nous est épargné : la misère, la crasse, la violence, la faim. Les personnages des Bas-Fonds ont tout vécu et leurs histoires sont portées à la scène, sans concessions, par une distribution entièrement bilingue. Le projet s’inscrit dans l’accord de coopération culturelle entre la Communauté française et la Communauté flamande, et les acteurs s’expriment avec fougue en Français, en Néerlandais et souvent dans les deux langues en même temps. Preuve s’il en fallait encore que la pauvreté ne suit aucune frontière linguistique.

Criant de vérité, Les Bas-Fonds fait l’effet d’un coup de poing. Et c’est d’une démarche mal assurée que nous quittons désormais la salle de théâtre dans laquelle nous étions rentrés si confiants. Un rappel qu’il est toujours bon de faire.

Théâtre National Wallonie-Bruxelles