La reprise, Histoire(s) du théâtre (I)

Bruxelles | Théâtre | Théâtre National Wallonie-Bruxelles

Dates
Du 4 au 10 mai 2018
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre National Wallonie-Bruxelles
Boulevard Emile Jacqmain, 111 1000 Bruxelles
Contact
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+32 2 203 41 55

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La reprise, Histoire(s) du théâtre (I)

Dès le début, le théâtre a été une incantation des morts, une expérience rituelle de crimes primitifs et de traumatismes collectifs. Dans « La Reprise », première partie de la série « Histoire(s) du théâtre » de Milo Rau, le metteur en scène et auteur aborde le tragique sous la forme d’une narration aux points de vue multiples d’une affaire criminelle en cinq actes. Qu’y a-t-il à l’origine d’un crime ? Intention ou coïncidence ? Quel rôle joue le public ? Quelle est la faute du collectif ? Peut-on reconstituer un crime ? Et qui va-t-on mettre sur scène ? Avec les quatre comédiens Sara De Bosschere, Sébastien Foucault, Johan Leysen et Tom Adjibi, ainsi que le magasinier Fabian Leenders et la gardienne Suzy Cocco, il cherche à comprendre un crime capital, en même temps que des malheurs et les émotions fondamentales de l’expérience tragique : perte et tristesse, mensonge et vérité, désastre et peur, cruauté et terreur. Six acteurs, professionnels ou amateurs, s’entremêlent dans la splendeur et les abîmes de la vie et du théâtre et se glissent dans les rôles des protagonistes d’une affaire de meurtre violente : un manifeste pour un théâtre démocratique du réel émerge.

Avec cette production, Milo Rau débute la série « Histoire(s) du théâtre », une enquête performative à long terme sur la plus ancienne forme d’art de l’humanité, qui sera poursuivie dans la saison 2018/19 par le chorégraphe congolais Faustin Linyekula. Dans cette première partie, Rau et son équipe reviennent sur les problèmes fondamentaux de leur travail artistique des 15 dernières années : la question de la représentativité de la violence et des événements traumatisants sur scène. Une recherche sur la condition humaine fondamentalement tragique et un chant sur le pouvoir du théâtre.

PRESSE

La Libre Belgique : “Après l’extraordinaire “Five Easy Pieces” autour de l’affaire Dutroux, Milo Rau signe un nouveau chef-d’œuvre avec “La Reprise : Histoire(s) du théâtre (I)” créé vendredi au National en ouverture du Kunstenfestivaldesarts. Le metteur en scène suisse, devenu directeur artistique du NT Gent, a bien le génie du théâtre, devenant un des plus grands d’Europe.” La Libre Belgique - Guy Duplat
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L’Echo
RTBF

RENCONTRES APRES SPECTACLE

Le 6/05 – 17:00, entrée libre (FR), durée 1h.
Intervenants : les acteurs de l. a pièce, Bertrand Daele, Frédéric Gillot, Hassan Jarfi, Caroline LamarcheModérateur : Eva-Maria Bertschy.

Pendant leurs recherches préparatoires, Milo Rau et son équipe ont croisé de nombreuses personnes qui ont inspiré leur travail. Lors de cette rencontre, les comédiens échangeront avec ces interlocuteurs leur expérience pendant les répétitions et les représentations.

Le 9/05 – 22:00, entrée libre (EN, FR, NL), durée 1h. En collaboration avec le magazine Médor.
Modérateurs : Flore Herman & Laure Saupique

L’équipe artistique s’entretiendra avec Olivier Bailly, membre fondateur du magazine d’investigation Médor. Avec la pièce comme point de départ, ils discuteront des moyens par lesquels le théâtre provoque des changements dans la réalité, lorsque le journalisme s’invite sur le plateau.

L’équipe de Médor sera également présente dans les espaces publiques (près du bar) pour prolonger la rencontre.
 

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2 Messages

  • La reprise, Histoire(s) du théâtre (I)

    Le 10 mai 2018 à 12:30 par Gabriel

    J’ai rarement vu un spectacle autant suffisant, le thème abordé est plutôt fort, délicat, mais la mise en scène, l’écriture du spectacle souffre d’une prétention bête, on croirait Milo Rau totalement sur de lui, n’ayant rien à prouver quant-à son talent. Ce que j’ai vu c’est d’une faiblesse rare, de plus 30 euros pour cette pièce ne vient que confirmer l’autosuffisance de son créateur qui devrait sérieusement se remettre en question. Je me sens honteux pour ce créateur.

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    • La reprise, Histoire(s) du théâtre (I)

      Le 12 mai 2018 à 15:55 par xavier

      Le théâtre est une chose bien mystérieuse. Pour moi, cette pièce est un chef d’oeuvre, la démarche d’écruture et d’articulation du réel est ambitieuse et simple, certainement pas prétentieuse. Ce spectacle est le meilleur que j’ai vu en 10 ans.

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Dimanche 6 mai 2018, par Juliette F

La reprise

Pour Milo Rau, le réel contient déjà sa densité de drame. Comme avec une seringue, il suffit d’en extraire un échantillon pour l’étudier, l’exposer, le comprendre.

Ce spectacle-laboratoire tente de mettre en réflexion la place que prennent les faits divers au sein de nos sociétés. Le rapprochement entre le réel et la fiction est au coeur de la recherche du metteur en scène, qui propose le premier volet de son triptyque « Histoire(s) du Théâtre ». Produit cette année par le Théâtre National et célébrant l’ouverture du Kunstenfestivaldesarts, « La Reprise (I) » se propose d’autopsier le théâtre au travers de la construction médiatique d’un évènement qui a marqué l’histoire d’une ville, ou d’un pays. Après « Five easy pieces » sur l’affaire Dutroux, Rau revient ici sur un fait divers qui a choqué la ville de Liège en 2012 : le meurtre de Ihsane Jarfi, un jeune homme passé à tabac et laissé pour mort à cause de ses orientations sexuelles et religieuses.
Comment représenter la violence sur le plateau ? Quelle voix prend le théâtre pour exposer des faits comme ceux-ci ? Comment s’implique le politique et le documentaire au sein d’un spectacle ? Où se situe la limite entre le drame et la fiction ? Quelle place a le comédien sur scène quand il est imprégné de l’histoire de l’autre ?
Cette proposition expérimentale, projette la pièce dans une réflexion globale sur la place du spectaculaire dans notre société contemporaine.

Milo Rau utilise un vocabulaire scénique qui renvoie sans cesse à un langage technique propre a l’investigation policière : reconstitution des faits, enquête, énigme à résoudre... sont des termes qui mettent le théâtre lui-même sur une table d’observation à la manière d’une « pièce à conviction ».

Pour interroger l’essence de son théâtre, le metteur en scène utilise le dispositif cinématographique sur le plateau (générique, captations en direct, documentation et vidéos...) afin de jouer simultanément avec les codes et indices de la fiction, des médias, de la mise en scène et du réel. Cet exercice produit inévitablement un trouble entre les personnages à l’écran et le corps des acteurs mais pose également la question de la construction d’un récit et de ses multiples temporalités.
Les scènes vidéo et le jeu des acteurs entrent en correspondance permanente, revisitant chaque étape de l’histoire comme dans les reconstitutions de scènes de crime, telles qu’elles sont menées dans les enquêtes de police où les conditions d’un meurtre sont parfois rejouées par des comédiens pour en comprendre la logique. Ici le metteur en scène se sert donc de ces tensions transposées entre réel et jeu pour explorer les mécanismes du théâtre.

Comme au tribunal, les déclarations ne concordent pas toujours exactement, elles sont subjectives, elles se décalent peu à peu de la scène réelle en fonction des souvenirs des témoins. Ce dispositif illustre précisément comment un discours se fabrique, produisant de multiples récits à l’intérieur d’un évènement. Où est la vérité ? Le théâtre peut-il y répondre ? Le doit-il seulement ?

C’est ainsi que le rôle des médias apparait comme étant le vecteur de récits au sein de la société. Le story telling fabrique des mythes, les journaux ou la télévision racontent par épisodes les étapes d’un procès et le déroulé d’un enquête. Tenant leur audience en haleine, gardant le suspens, menant des investigations parfois morbides, la scène médiatique attise la curiosité du public pour produire du spectaculaire et du fantasme collectif.

Pour orchestrer ce spectacle, toute l’équipe est allée à la rencontre de la famille de la victime et même de ses agresseurs. Les comédiens (professionnels et amateurs) ont vécu cette confrontation avec le réel pour s’imprégner du récit, certains ont même assisté à toutes les audiences du procès. Nous sommes face à un metathéâtre où les comédiens portent leur propre nom, et performent leur propre rôle : ils re-jouent le casting, ils racontent leurs expériences de l’évènement… L’illusion est annoncée d’emblée et le spectateur aussi est amené à remettre son rôle en question et à prendre de la distance sur ce qu’il voit. Pourtant, on est absorbé par le récit à de nombreuses reprises… Pourquoi ? Car Rau emploi tout l’appareillage propre aux films « tirés d’une histoire vraie », il tente de toucher le spectateur aux tripes avec un sujet violent, d’autant qu’il s’adresse à des personnes qui ont vécu l’évènement au travers des médias. Faire émerger des sensations fortes tout en mettant en lumière le processus de mise en spectacle lui-même, c’est là que Milo Rau trouve une forme forte et cohérente, qui met l’audience (et le théâtre) à l’épreuve.

C’est l’histoire d’une ville post-industrielle qui est dépeinte ici, à l’image du film « Les enfants du Borinage » de Patric Jean. Cet hommage à Henri Storck, qui témoignait en 1935 la réalité des classes ouvrières de la région Wallone, donne à voir des villes entières plongées dans la misère sociale pendant la crise post-industrielle. Dans le spectacle de Rau, on nous parle aussi de cette réalité dramatique qui a frappé un grand nombre de régions minières et métallurgique dans les années 80, reflétant une violence politique et sociale forte, comme métaphore de la dépression, de la perdition d’une société. Plongé dans cette faille, le spectacle prend une ampleur politique puissante, allant même jusqu’à accuser l’État lui-même du crime dont on parle ici : « Pour moi s’il y a eu préméditation, c’est la société qui est responsable de cette préméditation. Ma thèse, c’est que ce ne sont pas les individus qui sont racistes ou homophobes, c’est la société qui donne des expressions pour l’être. » répond Milo Rau à l’intervew de Christian Jade (RTBF, 3/05/18). 


Comment sait-on quand termine le spectacle, puisque l’actualité et la théâtralité sera toujours présente ? Chaque soir, les comédiens vont reposer les questions, vont rejouer leur propre rôle, interroger le théâtre et le monde au travers du spectacle. Belle ouverture pour le Kunstenfestivaldesarts qui s’annonce éclectique, réflexif et engagé cette année encore.

En août 1830, on raconte que les spectateurs de l’Opéra de la Monnaie sortent de la salle, hystériques, et font éclater la révolution Bruxelloise dans une violente émeute en pleine période de crise économique.
Le 17 mai 2018 à 17h, sur la même place, aura lieu un rassemblement pour lutter contre les discriminations sur la base des identités de genres, des orientations sexuelles, des origines ethniques, culturelles et religieuses en hommage à Ihsane Jarfi. L’actualité est ingérée par le théâtre pour alors contaminer le réel à son tour, dans un mouvement cyclique.

Théâtre National Wallonie-Bruxelles