Vendredi 26 février 2016, par Catherine Sokolowski

Les labyrinthes de l’âme

Nathalie Rozanes propose un hommage très personnel à Francesca Woodman, légende de la photographie disparue en 1981. En se basant sur les œuvres de l’artiste, sur son journal intime, sur les écrits poétiques d’Ariana Reines et en y ajoutant sa propre vision des choses, l’actrice nous promène dans son monde, fait de subtilité, d’humour, de réflexion et d’introspection. Fort intuitif, ce voyage paraît parfois vague ou inachevé mais il permet de se rappeler Francesca et de découvrir une comédienne talentueuse, Nathalie Rozanes.

Qui était Francesca Woodman ? Photographe de génie mais aussi artiste multidisciplinaire, Francesca (née en 1958) était jolie, secrète et douée. Qualités que Nathalie Rozanes partage avec elle, toute en finesse, charmante et subtile. Mais la comparaison a ses limites : la première s’est suicidée dans son loft New-Yorkais à l’âge de 22 ans, hantée par les ombres qui marquent ses œuvres et dévastée par des épreuves récentes. Nathalie, au contraire, est lumineuse, joyeuse, positive. Elle tente de communiquer toute l’admiration qu’elle ressent pour la première même lorsqu’elle parle de crise existentielle.

« La rencontre avec elle est un dialogue avec soi-même » prévient Nathalie.

De ce contraste naît un spectacle surprenant, déferlante de références en forme d’hommage à l’artiste culte (et à d’autres figures féminines) qui laisse le spectateur dans l’expectative même s’il est partiellement éclairé par l’exposition « Iconic Echo » proposé en conclusion. Certaines caractéristiques sont laissées de côté. Le nu par exemple, très présent chez la photographe, n’est pas exploré par la comédienne. L’expo propose une nouvelle image du travail de Woodman à travers le prisme d’autres artistes (Lucie Guien, Thomas Depas et Thibault Grégoire).

Sérieuse, proposant quelques références explicites aux dérives de la société contemporaine, prônant la « micro-politique » ou force de l’interrogation individuelle pour solutionner les problèmes, l’artiste peut aussi se montrer absurde, surréaliste ou drôle. Nathalie peut tout faire passer mais ne le fait pas assez. Multipliant les références dans un flou contrôlé, elle propose des images brutes et pensées décousues sans que le spectateur ne se sente réellement impliqué. Un sentiment d’incomplétude flotte dans l’air. Volontaire ? Probablement, comme moteur de réflexion. Dans tous les cas, un intéressant miroir du travail de la photographe et une belle rencontre avec une artiste enthousiaste.

Catherine Sokolowski