« La vie, c’est ce qui arrive quand on a d’autres projets. » Cette phrase attribuée à John Lennon donne le coup d’envoi du périple que Marc Ysaye propose à travers la vie et l’œuvre d’un génie musical, icône du XXe siècle mais aussi du groupe qu’il a fondé et qu’il estimait plus connu que Jésus-Christ.
John Winston Lennon naît le 9 octobre 1940 à Liverpool dans un environnement familial compliqué. Son père est marin, sa mère, un peu fofolle, a épousé cet homme pour fuir la tyrannie de son père. Elle est incapable de s’occuper de son fils qui sera confié à sa tante Mimi. C’est pourtant Julia, sa mère, qui lui offre sa première guitare et lui apprend à en jouer. Un jour que sa mère quitte la maison après lui avoir rendu visite, elle se fait renversé par un policier ivre et meurt sur le coup. Ce drame va marquer le jeune John pour la vie.
« Ma mère est une absente qui ne m’a jamais quitté », dit-il dans une interview fictive à laquelle le comédien Emmanuel Dekoninck prête sa voix. Le décès prématuré de sa mère va également le rapproché de Paul Mc Cartney orphelin de mère dès l’âge de dix ans. Le jeune guitariste est venu montrer ce dont il est capable à John Lennon qui se produit avec son groupe The Quarrymen dans une fête paroissiale, le 6 juillet 1957.
Le gaucher rejoint le groupe et y amènera plus tard un certain George Harrison. Avec Stuart Sutcliffe à la basse et Pete Best à la batterie, le groupe décide de changer de nom et opte pour les beetles (scarabées) mais transforment le deuxième « e » en « a » en référence à la beat generation. Après s’être fait une petite réputation à Liverpool, le groupe est engagé, en août 1960, par un propriétaire de clubs à Hambourg, en Allemagne. Ils se produisent, nuit et jour, à de nombreuses reprises dans plusieurs clubs du quartier très chaud Sankt Pauli. Une véritable galère qui va leur apprendre leur métier. C’est à ce moment que Stuart Sutcliffe quitte le groupe, laissant la basse à Mc Cartney, et que Pete Best est remplacé par Ringo Starr, scellant ainsi la configuration définitive du quatuor qui va connaître une ascension fulgurante.
Les Beatles ont composé près de 200 chansons et enregistré douze albums originaux qui se sont vendus à deux milliards d’exemplaires à travers le monde. Dans son exposé, Marc Ysaye évoque les aléas de la courte vie (de 1962 à 1969) de ce groupe mythique : l’arrivée de Brian Epstein comme manager et son décès, l’audition ratée chez Decca, le projet Get Back avec le nouveau manager Alan Klein qui finira par confier ces précieuses bandes au producteur américain Phil Spector. Ce dernier produit le disque « Let It Be » à sa façon, au grand dam de Paul Mc Cartney qui en réalisera une version épurée « Let It Be… Naked » en 2003. Mais aussi le dernier concert sur le toit de Apple Corps, le voyage en Inde, les tensions au sein des Fab Four...
En septembre 1969, John Lennon quitte les Beatles mais tout le monde est tenu au secret pour ne pas compromettre les projets en cours de finalisation et, surtout, les ventes d’albums. Paul Mc Cartney lâche le morceau, le 10 avril 1970, dans un communiqué de presse annonçant la sortie de son premier album solo. Lennon est furax et frustré qu’on lui ait ôté le pouvoir de mettre fin à l’histoire des Beatles. Il va désormais se consacrer à sa femme Yoko Ono, à sa carrière solo et s’impliquer dans des causes sociales et politiques.
Il s’installe avec Yoko, se noie dans l’alcool, se brouille avec son épouse qui le met à la porte, s’installe à Los Angeles avec May Pang, sa jeune assistante et nouvelle compagne, se lie d’amitié avec des célébrités du monde musical comme Elton John et David Bowie, retourne chez Yoko qui lui donne un fils, Sean, dont il s’occupe comme un papa poule. Jusqu’à ce jour funeste, le 8 décembre 1980, où Mark David Chapman, un fan en quête de célébrité, met fin à coup de balles de revolver à sa vie et sa carrière au pied de sa résidence du Dakota Building à New York.
Raconteur d’histoires passionné, Marc Ysaye partage, images et bandes son à l’appui, avec enthousiasme sa connaissance pointue de la vie et la carrière de la rock star. Il faut dire qu’en matière de rock, il y connaît un rayon. Programmateur-animateur, producteur, responsable artistique puis directeur de Radio 21 avant de créer et diriger Classic 21, Marc Ysaye a également fondé, en 1975, le groupe Machiavel dont il est batteur, chanteur et co-compositeur. Il connaît la musique d’autant qu’il est aussi l’arrière-petit-fils d’Eugène Ysaÿe, violoniste, compositeur et chef d’orchestre belge qui a donné son nom à un concours musical devenu, en 1951, le Reine-Élisabeth.
Mais le jeune pensionné de la radio publique s’égare un peu dans les méandres de sa maîtrise de l’histoire du rock. « Lennon : the last day » nous promet le récit heure par heure sa toute dernière journée mais cette partie représente, à tout casser, un quart du spectacle. Cette partie semble en outre la moins documentée n’abordant, par exemple, les motivations et la personnalité du tueur que par le biais de lieux communs dispensables. Hors cette faiblesse, la plongée dans la plus fabuleuse aventure du XXe siècle est fascinante et donne juste envie de ressortir ses vinyles pour revivre les grands moments de la Beatlemania.