Mardi 26 mars 2019, par Didier Béclard

Théâtre ambulant de bric et de broc

Plongée dans le terroir avec « Les histoires de la baraque », des récits de vie quotidienne, de mort, de solitude, d’hommes et de femmes, qui se racontent, s’abandonnent au regard du spectateur.

Au milieu du plateau, il y a une baraque en bois. Une baraque qui s’est construite au fil du temps au gré de la découverte de planches abandonnées. A l’intérieur, il y a tout d’un théâtre : la scène, le public, les gradins des fils électriques et des comédiens. La lumière s’éteint et le noir envahit la salle. Des visages se dévoilent dans la pénombre, juste éclairés par une lumière venant de dessous le menton, comme quand on cherche à se faire peur.

Ces masques qui parlent racontent des histoires. Celle de Paco qui attend le retour de sa bien aimée, de l’armoire de sa bien aimée. Il y a aussi celle du roux, le mou, face à la guerre de l’eau. Et puis celle de l’homme de l’arbre, ou des marais, du maringal. « La bête aux seaux » et le Castelo, Castelo l’étranger. Vieux castel ce sont des ruines mais c’est chez lui, quand tu regardes la montagne ça dessine une ligne sur le ciel. Et Castelo cogne la pierre pour en faire sortir des visages, des corps. Et la mer n’est jamais loin. Bourreau de père en fils, un jour il faut trancher, couper court, et la première exécution du fils est la dernière du père.

Dans un cadre on ne peut plus intimiste – on dirait que ce sont les planches qui parlent – et très original, « Les histoires de la baraque » nous emmènent au gré des rivière, à travers les marais, au cœur des forêts, dans l’odeur de l’humus et de la sève. La langue se construit au fil du récit avec l’accent et les intonations de ceux qui le porte. Huit histoires qui occupent chacune une demie heure, présentées en alternance d’un soir à l’autre, plongent dans un terroir fait de mots oubliés, de mots d’enfant, de mots coulant – l’eau n’est jamais loin -, pour narrer des histoires tendres et cruelles, de vie, de mort, de solitude, la condition humaine dans une dimension pastorale.

La troupe Une Compagnie occupe tout le terrain, remplissant tous les rôles : acteur, bateleur, régisseur, bruiteur jusqu’au bar et la billetterie. L’écriture de Thierry Lefèvre est concise, efficace, mélodique, servie par des comédiens qui s’expriment engoncé dans une armoire ou accroupie au-dessus d’une jarre. On imagine ces histoires que l’on se racontait au coin du feu, simples, vivantes, attachée au territoire et au vécu...

« Les histoires de la baraque » de Thierry Lefèvre Cie Une Compagnie, avec en alternance Kevin Defossez, Simon Gautier, Thierry Lefèvre, Julie Leyder, Juan Martinez, Jérôme Nayer, Vincent Rouche et Delphine Veggiotti, jusqu’au 30 mars au Théâtre Le Boson à Bruxelles, 0471/32.86.87, www.leboson.be.