Lundi 19 décembre 2022, par Catherine Sokolowski

Si j’étais moi

Enivrez-le

Sven Punti Larsen est un homme d’affaire finlandais, « extraordinairement riche et puissant ». Il est le digne héritier de ses ancêtres, industriels et commerciaux. Cependant, tout comme eux, il devient anarchiste, compréhensif et généreux lorsqu’il a bu. « Si j’étais moi » s’inspire du théâtre politique de Bertolt Brecht, qui, dans « Maître Puntila et son valet Matti » (1940), illustre le thème de la lutte des classes. Sven Punti peut être vu comme le petit-fils de Maître Puntila. Avec son chauffeur, il parcourt les rues de Bruxelles dans un road trip déjanté, à la veille d’une importante réunion que l’homme d’affaires doit présider à la Commission Européenne. Une transposition contemporaine qui dénonce les dérives du néolibéralisme.

Une partie des spectateurs est assise autour de deux longues tables rectangulaires, comme celles qu’on peut imaginer meubler les conférences au sommet. Quelques objets illustrent çà et là le propos des comédiens. Sven (Fabrice Schillaci) et Emma (Marie-Hélène Balau qui campe la sœur de l’industriel) prennent également place à table.

Co-président de la commission mixte et extraordinaire pour la relance de l’économie en Europe, Sven Punti Larsen se rend à Bruxelles afin d’y présenter un discours d’inauguration à la Commission Européenne. Désigné comme expert, on lui remettra également le « Golden trophy » du businessman européen de l’année. Il reçoit ces honneurs pour son engagement pour le respect de l’environnement dans l’industrie pétrolière du Grand Nord (!).

Dans un lointain passé, après une soirée arrosée, la sœur jumelle de Sven s’est éclipsée et n’a jamais réapparu. Rebelle de la tribu, elle convainc le chauffeur de son frère (Audric Chapus) de le faire boire afin qu’il présente un discours radicalement différent en haut lieu.

S’en suit un road trip burlesque dans les rues de Bruxelles, avec un Sven survolté, ivre et délirant, un chauffeur qu’il voudrait pour ami, et une Emma très déterminée à transformer l’idéologie élitiste de son frère.

Le rêve ne se dissocie plus de la réalité.

Une mise en scène originale, trois acteurs au mieux de leur forme, un thème important mais quelques longueurs : le discours n’évolue pas vraiment et devient vite récurrent même si la pièce est intéressante, dénonçant la domination de la finance, les inégalités et les abus de pouvoir. Une création de Mathias Simons.