Quarantaine

Saint-Josse-Ten-Noode | Théâtre | Théâtre de la Vie

Dates
Du 13 au 24 octobre 2020
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre de la Vie
Rue Traversière, 45 1210 Saint-Josse-Ten-Noode
Contact
http://www.theatredelavie.be
reservations@theatredelavie.be
+32 2 219 60 06

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Quarantaine

Variation sur la violence de notre monde, Quarantaine nous propose de suivre le fil rouge tendu par une femme au travers de sa nuit : Elisabeth, femme dans la quarantaine, ancienne institutrice, retranchée dans son appartement, comme en quarantaine. Une guerre gronde, quelque part, peut-être en elle. Délire ou réalité ? Dans sa solitude très peuplée, Elisabeth reçoit la visite régulière de Valeria, infirmière dénuée de patience et de compassion. Elle prétend aussi recevoir la visite d’un homme inconnu ainsi que d’un ancien élève, Gabriel. Et soudain nous sommes transportés ailleurs, dans un trou, une zone de guerre où deux soldats du même camp, et pourtant en guerre l’un avec l’autre, se livrent un combat verbal, à jamais en désaccord…

Quarantaine est une tentative de retisser une relation humaine, aux autres et à soi–même, de retrouver un chemin dans ce monde dévasté, en guerre, le nôtre. Une pièce vivante qui interroge notre espoir et notre impuissance face au monde, qui questionne ce que nous transmettons à nos enfants, et en appelle à l’énergie de vie qui peut malgré tout nous rester, face à l’hostilité du monde et nos violences intérieures...

Une création de la compagnie Petite âme, en coproduction avec le Théâtre de la Vie, le Théâtre de Liège, La Manufacture – CDN Nancy Lorraine, ThéâtredelaCité – CDN Toulouse Occitanie, DC&J Création. Avec le soutien du Tax Shelter du Gouvernement Fédéral de Belgique et de Inver Tax Shelter. Avec l’aide de la Fédération Wallonie-Bruxelles / Service Théâtre

Distribution

Écriture et mise en scène : Vincent Lécuyer
Avec : Véronique Dumont, Janie Follet, Adrien Desbons, Adrien Letartre.
Scénographie : Jean Lepeltier
Lumières : Julie Petit Etienne
Réadaptation lumières pour le théâtre de la vie : Lionel Ueberschlag
Costumes : Sandra Brisy
Réalisation des décors : Ateliers du Théâtre de Liège
Toile : Christelle Vanbergen, Agnès Brouhon

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Vendredi 16 octobre 2020, par Martin Edgar

Tentatives pour sortir de la Quarantaine

C’est une double reprise à laquelle on assiste, dans le très vertical Théâtre de la Vie donnant un surplomb puissant à la scène : la reprise de la programmation dans cet ancien bâtiment industriel, et la reprise de Quarantaine, la troisième création de Vincent Lécuyer (2019). A l’écriture et à la mise en scène, l’artiste décline une variation sur la violence, par le prisme d’Elisabeth et de ses dérives. Avec la prime à la parole comme bouée de sauvetage potentielle et la force des interprètes sublimes, cette pièce est définitivement à découvrir !

L’espace scénique symbolise à l’appartement d’Elisabeth : le bois, les briques et les (sublimes) toiles-pendrillons cousues nous confortent dans cette idée. Il est également un espace mental, où la parole performative résonne et se cogne. La femme, engoncée dans sa robe de chambre et dans sa quarantaine (l’âge comme l’isolement), reçoit la visite de plusieurs de ses semblables humains. L’infirmière Valéria, dévouée mais brutale, Gabriel, un ancien élève de cette ancienne institutrice, et un autre homme, mystérieux, distribuant sa vue philosophique et séductrice. Autrement dit, Elisabeth est seule, terrible, perdue. Dans les relations décousues, on retisse la trame de ses névroses : sa mémoire défaillante, son sommeil intermittent, son traumatisme face à l’enfant connard dont elle a, ’’bon dieu de bon dieu de bon dieu", fracassé le crâne contre celui d’un autre de ses élèves. Également, elle est spectatrice d’une guerre qui se joue, avec deux soldats coincés au front et dans une joute verbale. Métaphorique ou réelle, cette guerre qui semble se jouer au dedans d’Elisabeth met en lumière le point névralgique de la création : l’ampleur de la parole. L’ennemi ne semble pas être militaire, mais bien relationnel, et la seule manière de le vaincre est de l’inonder de voix.

En effet, Vincent Lécuyer, avec Quarantaine, cisèle les dialogues, explore les paroles de mémoire, de trouble, de pulsion en donnant la part belle à la fois aux échanges et aux monologues. Avec l’intention de montrer le décrochage et l’ostracisation par le prisme d’Elisabeth, la pièce interroge : que se passe-t-il quand l’abandon prend toute la place ? Quels visages s’invente-t-on pour peupler le quotidien, quelles formes doit prendre la nécessaire consolation ? L’obsession des photos, des livres ouverts et poussiéreux, de l’ancien élève admirateur rappellent au souvenir de ce qui fût, à l’épreuve du temps et de la vieillesse. Il faut, pour dénouer le nœud de cette intrigue, parler, parler jusqu’à l’explosion et à l’émotion pour espérer une renaissance. Pour sortir de la quarantaine et faire l’amnistie avec soi-même et avec les autres.

Et comme dit Peggy Thomas, directrice du Théâtre de la Vie dans l’édito de la Saison 20-21, "Oui des poètes. Oui des artistes. [...] Pour partager. Pour se rappeler notre humanité". Brillamment, avec force, Quarantaine vient épouser cette parole en donnant à la violence un sursaut de consolation. Si plusieurs lectures métaphoriques, relatives aux différentes réalités, se juxtaposent dans Quarantaine, toutes se rejoignent dans la possibilité de sauver Elisabeth. Ou quand l’exploration des violences ébauche une possible brèche d’espoir.

Théâtre de la Vie