Jeudi 1er mars 2018, par Catherine Sokolowski

Quand la rédemption n’est pas une option

Sirius, jeune manutentionnaire, s’intéresse à Zelda, une caissière. Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils ont la vie devant eux. Tout devrait bien se passer. Sauf que la vie de Sirius, elle est plutôt derrière lui. A 10 ans, Sirius et Tommy ont assassiné un môme de 2 ans et demi, à coups de barre de fer. Comment deux gamins peuvent-il en arriver là ? Comment espérer après avoir passé 8 ans dans une prison pour mineurs ? La compagnie Belle de nuit propose un spectacle autour de la problématique de la rédemption, s’interrogeant sur le droit de vivre et d’être heureux malgré l’irréversibilité des actes commis. Energie, violence et passion caractérisent cette mise en scène de Georges Lini qui évoque un sujet très contemporain avec humanité.

En 1993, dans un centre commercial de Liverpool, Robert Thompson (10 ans) et Jon Venables (10 ans) ont convaincu James Bugler, un petit garçon de 2 ans et demi, de les suivre. Ils l’ont ensuite frappé avec une barre de fer jusqu’à ce que mort s’en suive et déposé sur des rails. Le corps du petit garçon a été découpé en deux par un train.

Si ce genre de crime est heureusement très rare, il y avait déjà eu un cas similaire en Grande-Bretagne en 1968. Marie Flora Bell avait assassiné deux garçons de 3 et 4 ans (cas étudié avec minutie par Gina Sereny dans "Une si jolie petite fille : Les Crimes de Mary Bell"). Ces jeunes enfants délinquants d’une dizaine d’années manquent cruellement d’attention et d’amour, comme le rappelle Sirius dans un moment de crise : « Je rêve que quelqu’un me prenne dans les bras. » La société ne leur a pas fait de cadeau, ceci excuse-t-il cela ?

Le sujet est plus vaste : le séjour en prison efface-t-il la dette envers les victimes ? A l’issue de leur peine, les condamnés doivent-il être pardonnés ? On pense à Bertrand Cantat, Michelle Martin ou même Dutroux. Actuellement, la réponse semble plutôt négative, certains ex-prisonniers recevant une nouvelle identité pour ne pas être identifié par des citoyens peu enclins au pardon.

L’écriture de la pièce a été confiée à l’auteur belge Stanislas Cotton qui a choisi un récit non linéaire, alternant crises, colères, violence, scènes de joie, passé et présent. Les rôles sont interprétés par de jeunes acteurs, le très prometteur Felix Vannoorenberghe (Sirius), tout juste sorti de l’IAD, Wendy Piette et Arthur Marbaix. Le bonheur est-il un droit et le pardon un devoir ? Vous ne le saurez pas en sortant mais les questions méritent d’être posées et ce spectacle d’être vu !