Pour commencer, une scénographie typique de l’auteur, élémentaire et nomade : quelques cageots en bois empilés dans un désordre organisé, déplaçables partout, une ambiance intimiste avec peu d’éclairage, et une mappemonde illuminée.
Soit un décor simple où l’acteur prend toute sa place !
Sa place, l’acteur la prend avant même le début officiel des festivités. En effet, David Murgia (acteur) et Carmelo Prestigiacomo (guitariste), à l’allure décontractée et sérieuse, sont déjà présents sur scène à l’arrivée des premiers spectateurs.
Cette introduction annonce de suite la couleur : le public fait partie intégrante du spectacle ! Les différents personnages ne vont pas l’épargner : ils vont l’impliquer de telle sorte qu’il se sente directement concerné et ne puisse pas s’en tirer indemne.
Effectivement, tout au long, le spectateur est percuté à la fois par des récits de personnes immorales, froides et inhumaines, par des discours politico-économiques d’hommes de pouvoir impitoyables et par des enregistrements sonores qui glacent. Cette alternance confère aux scènes un réel dynamisme et tient l’assemblée en haleine.
La dynamique est renforcée par la vitalité de l’acteur, illustrée notamment par son parfait débit de parole rapide, par sa forte implication dans ses rôles et sa sincérité. En accord avec cette énergie ambiante, Carmélo Prestigiacomo ajoute par le son de sa guitare une atmosphère dramatique.
Le cadre froid, violent, vivant et grave planté, il peut donc accueillir le texte criant de l’auteur : un texte très justement imprégné par le vécu de l’acteur ; un texte puissant par ses messages, ses métaphores, ses répétitions, son humour ; un texte, véritable reflet cynique et pessimiste des aberrations de la société actuelle.
En choisissant cette fois le parti de la classe dominante, Ascanio Celestini avec l’aide de ses collaborateurs, parvient toujours avec beaucoup d’humour et de poésie à ébranler la conscience collective du public, renvoyé à sa pauvre condition de peuple soumis et infantilisé.
Ascanio Celestini, en bon sociologue qu’il est, a donc réussi son pari avec cette jeune création. Par son art, il participe à l’ouverture des consciences politiques : une fois que les lumières tombent, le spectateur est certes désespéré par une telle fatalité mais ne peut que se sentir animé par un désir de changement ! Quand la classe « Celestini » marque le début d’une nouvelle révolution culturelle !