Mardi 5 décembre 2017, par Palmina Di Meo

Merdier ou pas, j’y suis, j’y reste !

Abdel Nasser avait tout pour devenir un manager modèle au salaire confortable. Bon élève, formé aux États Unis, tout avait commencé de façon « sérieuse ». Sauf qu’il a en lui une fibre humoristique qu’il n’a cessé de cultiver depuis son plus jeune âge. Ce talent et l’attrait du show-biz ont eu raison de ses derniers bastions de résistance.

Sur les traces du grand Gad qu’il découvre à 15 ans lors d’un passage à Bruxelles et qu’il admire sans réserve, il vole à son tour vers le succès. Son premier stand-up « Se marier à tout prix » lui vaut une reconnaissance immédiate et l’encourage à « rancarder » son public pour une nouveau face à face comme un vieil ami avec qui on a envie de relancer la conversation sur les problèmes existentiels, les tracas quotidiens qui font la pluie et le beau temps, et puis les angoisses que l’on partage face à un avenir incertain et une actualité peu rassurante, a fortiori quand on est arabe !
« Retourne dans ton pays », découvert à l’Espace Magh, a d’emblée séduit un public déjà familier, attentif à son discours parsemé de boutades sur l’identité, l’intégrisme, l’interculturalité, le racisme... Et la difficulté à survivre dans un tel chaos, sauf à lui tordre le cou par le rire. Car on a beau être naturalisé, marcher sur des œufs et distribuer des sourires, aucune chance que votre chemin soit parsemé de roses quand on vous a donné un nom comme Abdelkodous !
BCBG, décontracté, Abdel Nasser joue de son art inné à aborder des questions épineuses et dérangeantes avec une autodérision et une légèreté de ton qui font mouche, suscitent la réflexion entre modernité et tradition, entre discours généralistes et anecdotes familiales. Ancré dans la réalité belge, son plaidoyer pour un dialogue impartial, où chaque mot pèse de son sens, marque des points sans sombrer dans l’apitoiement ni la confrontation.
Une occasion de rencontrer un artiste à l’humour sensible, hybride, où pointe une forme de détresse humaine, et qui maîtrise la scène avec un bagou et un souffle personnel qui n’a rien à envier aux plus grands.
Palmina Di Meo