Les Larmes de Nietzsche

Théâtre | Comédie Claude Volter

Dates
Du 25 février au 8 mars 2015
Horaires
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Les Larmes de Nietzsche

Si Nietzsche avait été soigné par le Dr Breuer, maitre à penser de Freud, la philosophie européenne en aurait-elle été modifiée ? Une histoire d’amitié entre deux hommes, entre deux sciences. Un jeu d’échecs machiavélique entre le psychiatre qui s’ignore et le philosophe méconnu. Qui soigne l’autre ? D’après l’époustouflant roman d’Irvin D. Yalom, le texte est porté pour la première fois à la scène en langue française.

Avec : Jean-Claude FRISON, Yves CLAESSENS, Rosalia CUEVAS & Benjamin THOMAS
Adaptation & Mise en scène : Michel WRIGHT
Création lumière & Régie : Sébastien COUCHARD

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2 Messages

  • Les Larmes de Nietzsche

    Le 12 octobre 2016 à 13:01 par Aurelia

    "Les larmes de Nietzsche". Une pièce que je vous conseille vivement. Elle tombe à pic à notre époque où les consciences se réveillent de plus en plus. Nietzsche, cet incompris, ce précurseur, ce visionnaire. On le connait tellement mal : on lui attribue, souvent , l’étiquette de pessimiste à cause de sa contre-utopie. Mais les utopies nous mènent souvent droit au mur. Partir de la "Réalité" et non plus des "réalités", à la recherche de la Vérité, en déconstruisant les conditionnements leurrant que certaines croyances nous ont inculqués. En ce sens, je trouve qu’il s’entendrait bien avec Krishnamurti qui parle également de cet effondrement de ce château de sable que l’on se construit pour se rassurer (cfr.le livre "Briller de sa propre lumière", par exemple). Oser affronter la vérité, cela angoisse, fait perdre nos repères et sortir de sa zone de confort. Mais c’est tellement libérateur. Et ce que nous vivons ensuite est vrai et non "imaginé". Cela éviterait bien des névroses et de passer à côté de sa vie. Bref, cette pièce nous fout de belles claques libératrices et peut déranger. Mais à qui veut bien se laisser remettre en question, elle constitue en soi une petite thérapie qui "ouvre les yeux". Un pas vers la liberté et la sérénité. L’évocation de divers sujets métaphysiques m’a également parlé. Cela m’a donné envie de lire Nietzsche ! Bravo tout particulier aux comédiens qui, à la manière de Nietzsche, ne jouent pas mais SONT et VIVENT. MERCI !!! (représentations jusqu’au 16/10 !)

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Lundi 2 mars 2015, par Jean Campion

Médecin du corps, médecin de l’âme

Professeur à l’université de Stanford (Californie), Irvin Yalom est un psychiatre, qui a publié de nombreux ouvrages scientifiques. Mais il a écrit aussi plusieurs romans en rapport avec sa spécialité. Dans "Mensonges sur le divan" (2006), il démystifie avec beaucoup d’humour la psychanalyse et dans "La Méthode Schopenhauer" (2005), il sensibilise le lecteur à deux de ses grandes passions : la psychothérapie et la philosophie. On les retrouve au coeur de "Et Nietzsche a pleuré" (2004). Imaginant un échange de rôles entre le docteur Breuer et le patient Friedrich Nietzsche, l’auteur nous fait assister à l’éclosion d’une amitié et à la naissance de la psychanalyse. Adapté intelligemment par Michel Wright, "Les Larmes de Nietzsche" nous offre une découverte ludique de sa pensée.

Le docteur Josef Breuer est perplexe. L’impétueuse Lou Salomé voudrait qu’il soigne Friedrich Nietzsche, en pleine dépression. Le philosophe ne se remet pas de l’échec du ménage à trois, qu’ils ont vécu avec Paul Rée. Mission délicate que Mathilde, la femme de Breuer, voit d’un très mauvais oeil. Depuis la thérapie avortée d’Anna O., son couple bat de l’aile. Témoin de cette crise, le jeune Freud s’efforce d’apaiser Mathilde, mais il encourage Breuer à se lancer dans une nouvelle expérience de "cure par la parole". Des discussions passionnées baliseront ces balbutiements de la psychanalyse.

Dès la première rencontre, Nietzsche se montre carré : pas question de lutter contre ses tourments. Il veut simplement savoir s’il risque la cécité, s’il pourra échapper à ses migraines et s’il vivra encore longtemps. Breuer prend des notes, promet des réponses et s’intéresse à ses livres "Humain, trop humain" et "Le Gai savoir", boudés par le public. Rassuré par l’honnêteté du médecin, le philosophe développe ses idées contestataires. Exemple : "Tout acte est dirigé vers soi, tout service ne sert que soi, tout amour n’aime que soi." Victime d’une terrible crise, Nietzsche frôle la mort. Breuer parvient à le sauver et, gagnant sa confiance, lui fait accepter une inversion des rôles.

Avec une exigence implacable, le philosophe presse "Josef" de questions et lui fait constater que jamais il n’a fait de libre choix. Il l’incite à devenir ce qu’il est : "Vivez pleinement la vie ! L’horreur de la mort disparaît, dès lors que l’on meurt en ayant vécu jusqu’au bout." Piégé par son subterfuge, Breuer se libère de son amour obsessionnel pour Anna O. et retrouve la sérénité. Contrairement à Nietzsche qui, en jouant les confesseurs, ravive en lui la souffrance provoquée par la rupture avec Lou Salomé. Cependant ces échanges ont permis aux deux hommes de se soigner mutuellement et de nouer une amitié sincère, basée sur une estime réciproque.

Le sujet est ardu. Et pourtant ce spectacle brille par sa pertinence et sa vivacité. Bravo à Michel Wright pour la maîtrise de la progression dramatique et la fluidité de sa mise en scène. A la différence de beaucoup de philosophes allemands, Nietzsche utilise des phrases courtes et denses. Une langue limpide illustrée par des formules tranchantes comme "Le désespoir est la rançon de la lucidité" ou drôles comme "J’ai toujours considéré que le privilège des morts est de ne plus mourir !" Irvin Yalom a pris des libertés avec l’histoire, mais a dessiné des personnages crédibles, que les comédiens incarnent avec justesse. Rosalia Cuevas fait sentir que Mathilde est une femme meurtrie, anxieuse, qui espère malgré tout sauver son couple. Dans la peau de Sigmund Freud, Benjamin Thomas a des allures de premier de classe. A vingt-six ans, il impressionne par son autorité et sa compétence. Yves Claessens est un Nietzsche rugueux, sapé comme un bûcheron. Il n’est plus professeur à Bâle, mais fascine par la clarté de son discours et la force de ses emportements. Sa conviction masque son désespoir. Par son jeu élégant, nuancé et la chaleur de sa voix, Jean-Claude Frison rend le docteur Breuer fort attachant. Féru de psychologie et d’hypnose, celui-ci refuse de voir sa carrière enterrée par une faute professionnelle. Et c’est avec enthousiasme qu’il s’embarque dans une nouvelle aventure. Le duo Claessens - Frison est un atout majeur de cette création mondiale très réussie.

Comédie Claude Volter