Les Corbeaux

Saint-Josse-Ten-Noode | Théâtre | Théâtre de la Vie

Dates
Du 14 au 25 janvier 2020
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre de la Vie
Rue Traversière, 45 1210 Saint-Josse-Ten-Noode
Contact
http://www.theatredelavie.be
reservations@theatredelavie.be
+32 2 219 60 06

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Les Corbeaux

Le décès soudain de l’industriel Vigneron laisse sa veuve, ses filles et son fils dans la sidération et la vulnérabilité. Dépassée par son deuil et les procédures de succession, la famille n’aura d’autre choix que de déposer sa confiance dans les mains des associés du défunt, des notables qui verront dans ce drame l’opportunité de s’accaparer une fortune laissée sans gardien. La cupidité et le cynisme permettront à ces corbeaux d’abuser des Vigneron jusqu’à les réduire au plus total dénuement.

Pièce phare du « théâtre cruel », Les Corbeaux, d’Henry Bècque, dépeint le tableau d’une famille bourgeoise et patriarcale du XIXème siècle, menée à sa perte par des délinquants en col blanc. Sans chercher à créer d’illusion réaliste, Aurélie Vauthrin-Ledent convoque dans sa nouvelle création la choralité de sept comédiens endossant chacun différents rôles, voyageant entre l’intime et le social, l’identification et la distanciation.

Rencontre après-spectacle avec l’équipe de création le 24 janvier.

Exposition en marge des représentations. Illustrations de Valérie Detemmerman.

Une création de L’Aencrophone en coproduction avec le Théâtre de la Vie.

Distribution

Texte : Henry Bècque / Mise en scène, scénographie, costumes : Aurélie Vauthrin-Ledent / Jeu : Rachid Benbouchta, Renaud Cagna, Quentin Chaveriat, Leïla Putcuyps, Anne Raphaël, Jef Rossion, Juliette Tracewski, Aurélie Vauthrin-Ledent / Dramaturge : Tomás Pereira Ginet / Assistanat m.e.s ; régie son : Quentin Chaveriat / Stagiaire : Johanne Pastor / Créa. lumière : Thibaud Decoene, Aurélie Vauthrin-Ledent

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5 Messages

  • Les Corbeaux

    Le 18 janvier 2020 à 00:44 par cécile

    belle mise en scène et beaux costumes originaux , mais les actrices pas toujours compréhensibles et spectacle un peu trop long

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  • Les Corbeaux

    Le 20 janvier 2020 à 11:30 par Charlotte V.

    Succession de tableaux soignés, précis laissant aux.comédien.ne.s tout l’espace au jeu, aux dialogues qui appellent à un minimum de dons de mémorisation, déjà une performance !
    Performance de presque 2h30, et pourtant la partie post décès de Mr Vigneron aurait pu s’étendre.
    Part belle aux décors & aux costumes, nous serons le public d’époque !
    Que le corbeau soit vautour, tour de renard, les lambeaux orphelins et la veuve nous ramènent dans une succession d’injustices, et de folies sous autorité patriarcale.
    Du grand théâtre !

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  • Les Corbeaux

    Le 20 janvier 2020 à 14:44 par Aude

    Un vraiment beau moment
    esthetiquement tres réussie par une somme de details qui font la différence , les 2:40 de cette piece passent tres vite et on en ressort en réfléchissant a notre monde ou predomine l appat de l argent « l amour n existe pas, d’ailleurs personnellement je ne l ai jamais rencontré ! ». Le texte reste actuel. Bravo aux acteurs qui assurent plusieurs roles sans jamais sortir de scene...

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  • Les Corbeaux

    Le 21 janvier 2020 à 19:25 par Sylvie

    Une mise en scene inventive qui va droit au but, des comediens investis et virtuoses, interpretant plusieurs personnages dans la plus grande clarte. On ne voit pas passer le temps. La piece est passionnante et toujours tres actuelle (les elites qui se pensent autorisees a accaparer les ressources d’aujourd’hui et des générations futures ...... Courez-y !

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Samedi 18 janvier 2020, par Jean Campion

Dépecer le cadavre

Solidaire des "innocents qui se débattent contre la force et toutes les tyrannies", Henry Becque souligne dans "Les Corbeaux" la vulnérabilité d’une mère et de ses trois filles, livrées au pouvoir de charognards. Depuis la création de la pièce, en 1882, les femmes ont conquis des droits, qui leur permettent, en principe, d’échapper au carcan d’une société patriarcale. Mais dans notre monde capitaliste, tyrannisé par l’argent, les personnes privées de savoir sont toujours à la merci de notables ou d’escrocs cultivés, qui profitent de leur ignorance. C’est ce que nous montre cette version intemporelle, conçue par Aurélie Vauthrin-Ledent. Mêlant jeu choral et jeu intimiste, huit comédiens n’incarnent pas des personnages, mais jouent des rôles d’hommes ou de femmes, dans une histoire sordide de succession.

Vigneron est un self-made-man rayonnant. A la tête d’une fabrique, qu’il a fait prospérer, il achète des terrains, fait construire des maisons... Son épouse dévouée prend plaisir à commenter cette réussite rassurante pour toute la famille. Avec la complicité de son père, le fils profite de sa jeunesse. D’ici quelque temps, papa le fera entrer dans les affaires. Il suffit que Judith, "l’artiste", entonne un chant pour que tout le clan se mette au diapason. Même s’ils trouvent leur fille Blanche bien jeune pour les quitter, les parents se réjouissent de la voir se fiancer au fils de madame "de" Saint-Genis. Marie, "la raisonnable", est la seule à émettre une note discordante dans cette euphorie. Voyant son père s’empâter, elle voudrait qu’il mange moins, qu’il consulte un médecin... Des appels à la prudence, rejetés par un homme sûr de lui.

Le couperet tombe. Brutalement. Une apoplexie foudroie le pater familias et déclenche la ruée des corbeaux. Pas de temps pour le deuil. Tessier a déjà fait les comptes. Après la vente de la fabrique, il restera à la veuve de son malheureux associé à peu près 50.000 francs. Brandissant la menace d’hypothèques, le notaire Bourdon la presse de vendre ses terrains. Tout retard lui coûte de l’argent. Chacun défend âprement ses intérêts, mais ces corbeaux font alliance pour empêcher l’architecte Lefort de participer à la curée. Désemparée par cette catastrophe inimaginable, madame Vigneron confie son désarroi à madame de Saint-Genis, venue lui annoncer, avec diplomatie, l’annulation du mariage de son fils avec Blanche. Cette veuve, qui a appris les règles du jeu, l’incite à se méfier de tout le monde.

Son expérience lui permet de détruire habilement les illusions de Blanche. Celle-ci ne s’en remettra pas. Losqu’ obligée de gagner sa vie, Judith envisage d’enseigner la musique ou de monter sur scène, son professeur méprisant ridiculise cette initiative. Accumulation de factures à régler. Madame Vigneron, affolée, pousse Marie à se montrer aimable avec Teissier. Intéressé par la fraîcheur de cette jeune fille réaliste, le vieil homme paie quelques dettes. Malgré sa prudence, Marie est prise au piège. Le loup est entré dans la bergerie et on l’y a invité. Nouveau pater familias, il met en garde sa future épouse : "Vous êtes entourés de fripons, mon enfant, depuis la mort de votre père".

La pièce, qui s’ouvre sur une joyeuse fête de fiançailles, débouche sur un projet de mariage écoeurant. L’auteur s’attarde trop sur l’image d’Epinal d’une famille bourgeoise barbotant dans le bonheur. Cependant, dès que la descente aux enfers s’amorce, on la sent inéluctable. Les illusions fondent comme les glaçons lumineux. La mise en scène souple et décontractée d’Aurélie Vauthrin-Ledent rend attrayant ce spectacle de deux heures quarante. En voyant les acteurs représenter plusieurs personnages, modifier le décor, changer d’apparence, nous restons à distance du drame. Interventions musicales et clins d’oeil, comme ce personnage réduit à un chapeau, aèrent la représentation. Très dynamiques, les comédiens lui impriment un rythme soutenu. Pas de pathos, mais une mise en évidence de la perfidie des rapaces. Mention spéciale à Jef Rossion, un notaire Bourdon, à l’autorité glaçante.
Notre société est bien différente de celle décrite par Henry Becque. Mais les méfaits du capitalisme offrent un terrain favorable aux prédateurs. Paradis fiscaux, escroqueries, fake-news en témoignent. Pour ne pas en être victimes, la vigilance s’impose.

Jean Campion

Théâtre de la Vie