Jeudi 7 mars 2013, par Dominique-hélène Lemaire

Le Chat Noir n’est pas mort ce soir !

A la Bastille, Nini peaud’chien…. Ça vous dit quelque chose ? Nous voici à Montmartre avec Aristide Bruant, Toulouse Lautrec, les bocs de bière, le vacarme des chansonniers, les jupes friponnes qui se soulèvent et les gorges offertes. Au Chat Noir, entre deux récitations lyriques, Jules Jouy se met au piano et entonne des chansons naturalistes. Poètes et public mêlent leurs clameurs. La poésie et les maximes d’Alphonse Allais sont omniprésentes. Verlaine au grand cœur, de ci …. de là. Nous sommes au Chat Noir version 2013.

La poésie, quelle mauvaise herbe ! Du chiendent, vous dites ! Elle passe la tête en ce début de printemps, entre les pavés de la rue du Belvédère, chez Fabienne, au théâtre de la Clarencière, théâtre littéraire. Que ce mot de grâce ne vous arrête pas, vous allez être totalement séduits.

Une revue des chansonniers du Chat Noir, relue, revisitée et réarrangée avec astuce et doigté par Rosalie Vandepoortaele plonge le public d’un soir dans une pure atmosphère 19eme et intemporelle à la fois. Ce spectacle est un vrai bijou. Le choix des textes est un pur bonheur. La poésie transcende le noir. L’interprétation parfaite des comédiens est un festival théâtral. Tout y est : esprit, humanité, sensualité, émotion, humour et rire virevoltent au travers de comédiens joyeux, grandeur nature -on est à leurs pieds- et professionnels en diable. A cause du Chat sans doute.

Le rythme du spectacle ne vous lâche pas. Un musicien exquis, Laurent Laigneaux. une valse poétique de lumières. Alexis Van Stratum, un comédien pur belge et ...si français de ton et d’entrain. Et deux délicieuses dames vêtues de chemisier en dentelle à col monté serti dans des jupes de soie faites de l’or de la vigne. C’est tout. Un Lampadaire, deux tabourets blancs, trois caisses vides de bouteilles de vin pour la résonnance et le spectacle vous emmène dans la galaxie poétique. Le brillant quatuor met en scène l’invisible et l’indicible. Ils bougent, ils dansent en long, en large et en travers sur la scène minuscule de la Clarencière. On se croirait au centre d’une volière. On n’aurait bien d’yeux que pour la belle Laurence Briand au regard étincelant et à la féminité gourmande. Mais la connivence qu’elle entretient avec Maya Boelpaepe son alter ego… est contagieuse et le duo bien connu de « Sense and Sensibility » fait que le temps s’arrête. Merci Jane Austern ! Oui le temps repart en arrière même et vous cloue de bonheur fou. Celui du Verbe. Fou comme chacun sait.

Car Fabienne Govaerts qui vous accueille au seuil de sa grande et vieille maison étrange au milieu de ses chats (plutôt « gris parce que les hommes sont saouls », et c’est dans le texte), dirige Le Verbe Fou, cette troupe belge qui pavoise à Avignon chaque année.

Et tous, public et artistes vous chanterez en chœur : "Je cherche fortune, Autour du Chat Noir, Au clair de la lune, A Montmartre ! Je cherche fortune Autour du Chat Noir, Au clair de la lune, A Montmartre, le soir, … pour empêcher le spectacle de finir !"

Dominique-Hélène Lemaire