D’après les nains aux pieds d’argile que nous sommes, c’est le texte qui manque le plus : nul verbe et si peu de lumière. La mise à plat du monde a réussi à battre le verbe à plat de couture et à éteindre les lumières. Si la pièce est une écriture plurielle, pourquoi ne pas avoir envoyé le pluriel féminin en scène, avec toute sa tendresse solaire ? Ce duo disparate nous dérange par son incongruité, ses balbutiements, ses tâtonnements, ses rugissements de boyscouts perdus dans le noir qui jouent au brigandage. Sa lenteur est franchement exaspérante. Touché-coulé ! Voilà !Hourrah ! C’est pourtant ce qu’elles voulaient démontrer ! Dans ce bric-à-brac d’idées, elles veulent laisser le mouvement ralentir, s’arrêter même, chose utopique, et redonner une nouvelle impulsion. Mais, sommes-nous cet hypothétique Dieu qui tient le ciel et les étoiles au-dessus des fourmis rouges ?
Elles ne marchent pas sur des œufs, elles les écrasent. Il est vrai que nous serons 9 milliards en 2060, là, elles ont bien raison de vouloir freiner la reproduction humaine ! Elles sont bien généreuses, mais pathétiques. L’histoire des cueilleurs-chasseurs versus les agriculteurs, qui forme l’ossature de la pièce, est bien maldroite et éculée. Nous n’avons pas huit ans… Qu’apportent-elles de nouveau : les doléances d’un siècle mort dans l’œuf, un catalogue de lieux-communs, une collection de poncifs ? Où sont les histoires promises ?
Pire, pour une veille de huit mars, elles ne font que suivre la consigne ! Après la grotte qu’elles ont investie de leurs peintures rupestres, les revoilà réfugiées dans une cuisine, où elles épluchent en toute convivialité leurs œufs à peler. Appelés à régner ? Non, cela ne fait pas rire. Juste un arrière-goût de lac salé ! On aurait aimé des bouffées de rêves, des mots poétiques, des chants, la matrice d’un monde nouveau. Ce texte si peu abouti et la gestuelle infantilisante écrasent nos espoirs de renouveau. Des propos de mémères révolutionnaires, jeunes et vieilles, mais pas un mot vrai de Louise Michel ou de Hannah Arendt, ni de Victor Hugo, – pourquoi pas, que diable ! –dont les noms sont à peine effleurés dans leur testament. Une fin sur le modèle de « Je te donne… », la partie la plus émouvante de la pièce, mais creuse quand même.
On les aurait voulues plus inventives, car à nouveau, elles ne font que suivre la consigne masculine, en disant vouloir donner le pendant des duos masculins légendaires tels que Sancho Panza et autres Sganarelle. La mise en scène, piètre oeuvre de patronage, ne sauve pas la mise, tant elle est décevante. Il n’y a que l’enthousiasme débordant des comédiennes. Est-ce assez ?
Dans leur discours sans perles ni diamants, elles semblent avoir oublié que ce sont nos enfants qui seront nos éclaireurs et nous montrent le chemin quand nous butons dans le noir et que c’est eux qui nous lèguent jour après jour, le merveilleux espoir du changement !