Samedi 8 février 2020, par Palmina Di Meo

L’habit ne fait pas la femme.

Madeleine dirige d’une poigne de fer un hôtel perdu au milieu d’une île alors que l’on négocie les traités de paix mettant fin à la première guerre mondiale. Cette guerre a ancré bien des peurs dans les esprits et chacun a cherché à survivre à sa manière. Les temps néanmoins sont durs et l’argent est rare.

Les femmes particulièrement ont dû apprendre à se débrouiller, ce qui a éveillé leur goût d’indépendance et de liberté. Mais les tabous sont toujours la règle : il faut garder sa dignité de femme et on ne se conduit pas comme un homme.
Pourtant l’hôtel va progressivement révéler des vérités différentes et les secrets bien gardés vont sauter comme des fusibles en surcharge.
« Les tricheuses » une histoire de femmes imaginées par Patricia Ide d’après une nouvelle de George Moore a le charme et le suspens de ces intrigues à tiroirs où les compartiments s’agencent à la fin pour créer un tout harmonieux. La scénographie est modelée dans ce concept puisque nous découvrons d’emblée quatre plateaux en superposition pour nous permettre de suivre le développement d’une crise qui mènera à une petite révolution féministe.
Entre comédie et tragédie comique, la pièce dresse quatre portraits des femmes fortes aux destins tourmentés. Elles se retrouveront dans un projet commun : la réalisation du rêve de Madeleine, une ex-aventurière dont les découvertes se doivent profiter à tous.

Patricia Ide en est encore à ses débuts de dramaturge. Elle prouve ici sa capacité à maîtriser les codes de l’écriture théâtrale dans un spectacle résolument progressiste, ne boudant ni l’humour ni les effets de surprise avec un objectif avoué : susciter la réflexion et rendre hommage aux femmes qui se battent pour s’imposer quitte à « tricher » sur leur identité.

C’est Michel Kacenelenbogen qui signe la mise en scène dans ce ton entre légèreté et distance voulu par Patricia Ide, séduite par l’ambiance et le grain de folie typique des années ’20.
Saluons le talent de Magali Pinglaujt et Jeanne Kacenelenbogen, méconnaissables en travesties. L’illusion est parfaite jusqu’au bout.

Palmina Di Meo

A VOIR AUSSI, RENCONTRE AVEC PATRICIA IDE
http://www.demandezleprogramme.be/Les-tricheuses#focus