Vendredi 27 septembre 2013, par Karolina Svobodova

Embarquez !

Après avoir exposé devant nos yeux incrédules Lala Ferrero et son vagin monstrueux (Blé), après avoir reconstitué sur scène la banalité d’un dimanche familial (Blé), la Clinic Orgasm Society embarque pour la planète Gliese 581 g. Dans le dernier volet de leur triptyque sur la normalité, les membres de la compagnie se lancent dans un programme d’échange culturel et artistique avec les habitants de cette lointaine planète, les glöörghs. La rencontre sera-t-elle possible ? Et à quoi peut bien ressembler la culture extraterrestre ? La Clinic vous emmène en voyage, prenez place.

Après 65 jours de biostase, la fusée s’est posée sur la planète Gliese 581 g et les membres de la Clinic Orgasm Society, vêtus de magnifiques combinaisons rouges, en débarquent.
Sous la tutelle de leur directrice artistique, cette équipe de choc a été choisie afin de représenter l’humanité sur cette étrange planète sentant le mazout.

Le dispositif mis en place pour nous permettre de suivre leurs aventures n’est pas sans rappeler celui qui a été développé par Rabi Mroué et Lina Saneh dans "33 Tours et quelques secondes". En effet, c’est grâce aux messages postés tout au long de la représentation que nous suivrons les avancées de cette importante mission.

La technologie et les nouveaux moyens de communication investissent le plateau, remplaçant la parole et les actes des acteurs. Le théâtre renoue avec la narration mais celle-ci est aussitôt problématisée dès lors qu’elle est totalement médiatisée.
Heureusement, les membres de la Clinic ne se contentent pas de nous abandonner devant des écrans. Leur présence et leurs actions tantôt illustrent, tantôt mettent en doute les propos écrits et c’est justement dans cette confrontation entre le dit et le vu, entre le relaté et le vécu que le spectacle est intéressant.

La notion de réalité est au centre de cette création. A l’heure de la réalité virtuelle, des avatars que l’on laisse vivre pour nous et de la construction de nos identités via les réseaux sociaux, fiction et réalité s’entremêlent, complexifiant nos existences d’une manière inédite.

Dans cette confusion, la Clinic puise la matière de son spectacle. Son exploration décalée des différents niveaux de réalité entre lesquels il nous faut à présent évoluer révèle de vraies questions. C’est là une des grandes qualités du travail de la compagnie. Chacun de leur spectacle sert d’occasion à la mise en perspective d’une thématique, à la découverte des limites et possibilités d’un dispositif.
Malgré une résolution qui, à mon sens, tombe quelque peu à plat, leur approche intelligente et ludique a, cette fois-ci encore, fait ses preuves.

Karolina Svobodova