Mercredi 27 février 2019, par Didier Béclard

Deux Formes courtes aux Brigittines

Dans le cadre du festival Brussels Dance !, les Brigittines proposent dans une soirée composée, ou pas, deux formes courtes. Deux créations remarquables servies par des artistes de premier choix : Marielle Morales et Ayelen Parolin, toutes deux récompensées pour le meilleur spectacle de danse par les Prix de la Critique. La première pour « Rushing Stillness » en 2015-2016 et la seconde pour « Nativos » en 2016-2017.

« En effet » de Marielle Morales (20h30) et « Wherever The Music Takes You » d’Ayelen Parolin (21h15, il est possible de voir les deux pièces séparément) jusqu’au 2 mars aux Brigittines à Bruxelles, 02/213.86.10, www.brigittines.be.

« En effet »
Le public est disposé en cercle autour du plateau au centre duquel se trouvent des projecteurs et un baffle. Vêtue d’une sorte de kimono en tissu lamé, elle apparaît progressivement dans une lumière naissante. Elle cherche les spectateurs du regard au son d’un simple bourdonnement.Les mouvements de son corps se saccadent répondant aux impulsions lancées par la bande-son. Un technicien déplace un projecteur pour créer au sol des halos de lumière dont elle semble être prisonnière, elle s’agite, se débat avant de s’écrouler.

Elle évolue sur le plateau mise en lumière à chaque déplacement par un projecteur. Un jeu de lumières indirectes - très inventif puisqu’il permet de créer un éclairage plus diffus – se déclenchent les unes après les autres au gré d’un bande-son digne d’un jeu vidéo. Dans « En effet », la danseuse et chorégraphe Marielle Morales, épaulée par les musiciens compositeurs Michiel Soete et Philippe Orivel, interroge les effets du son sur le corps, jusque dans ses recoins. Les sons (créés numériquement) sont empruntés au quotidien (ville, nature, tempête, ...), au corps lui-même (battements de cœur, frottements de la peau, ...) et à l’univers (explosions, météorites, ...). Chaque élément se répond et se stimule dans un voyage expérimental dans une réflexion sur les pollutions sonores.

« Wherever The Music Takes You »
Un immense lustre surplombe le plateau de la chapelle. Il s’allume lentement révélant peu à peu une ombre furtive qui se déplace dans la pénombre. Une pianiste extrait des sons de son instrument qui s’apparentent plus à des percussions qu’à de véritables notes de musique. Des fleurs dans les cheveux (une perruque), la danseuse a des allures grotesques, engoncée dans une combinaison qui lui donne des formes outrageusement exagérées. Son corps dialogue avec les sons émis en direct par le piano détourné. Elle semble se battre, se débattre, le visage marqué par des expressions de colère. Ses mouvements qui ont parfois des airs de samba saccadée laissent une trace visible dans une matière blanche qui recouvre le plateau, un peu comme si elle marchait dans la neige.

Depuis 2014, la danseuse et chorégraphe argentine, Ayelen Parolin collabore avec la pianiste et compositeure Lea Petra. « Wherever The Music Takes You » est le fruit d’une co-écriture qu’elles ré-explorent à deux sur scène, à la frontière entre performance et improvisation. Le duo travaille sur l’imprévisible comme un point de départ, un objectif à suivre, chacune séparément. Tenir et jouir s’entrechoquent, rage et plaisir se côtoient, se mesurent dans une énergie transportante. Liberté et lâche-prise viennent faire la nique à une époque marquée par les dérives sécuritaires et le prévisible dicté par des algorithmes.