Emily et Anna occupent la suite Spilliaert d’un hôtel situé à Ostende. Dans les pièces voisines, des huissiers sont réunis en congrès. Emily raconte sa vie et prend des notes sur le papier kitsch d’un hôtel qui ne l’est pas moins.
Après avoir été une « véritable petite star du piano » quand elle avait douze ans, Emily est devenue professeur de musique. Dans l’école où elle enseigne, elle rencontre Anna, fille de la femme de ménage. Leur relation fait scandale et elles doivent quitter l’école. Emily commente : c’est "le début de notre catastrophe".
Anna a un petit garçon, Eddy, qu’elle a eu avec Patrick quelques années plus tôt. Un soir, Eddy sort de la maison : l’histoire vire au drame.
A sa manière à la fois chaotique et précise, Hugo Claus décrit d’une part la relation qui (dés)unit Emily et sa mère, et d’autre part la passion qui rassemble les deux jeunes femmes, à la vie, à la mort. Par ailleurs, Anna n’est pas acceptée par la mère d’Emily : « On était heureuse et tu ne pouvais pas le supporter »
Hugo Claus ne fait pas dans la demi-mesure, chez lui, tout est exacerbé.
Mises au ban de la société, Emily et Anna souhaitent vivre pleinement leur amour, le reste importe peu. Désir, passion et sensualité s’associent dans cette chronique d’une fin annoncée au parfum de liberté.
« L’absurdité de la joie est plus forte que celle du chagrin ».
A la manière radicale des héroïnes de « Thelma et Louise », dans un décor rappelant le cinéma de David Lynch, Emily et Anna sont décidées à aller jusqu’au bout. Une très belle mise en scène réalisée par Christophe Sermet, sobre mais originale, qui laisse la place d’honneur aux comédiennes. Car ce texte n’aurait pas la même saveur sans la prestation magistrale de Claire Bodson et Laura Sepul qui forment un duo d’actrices exceptionnel. Vêtues de pulls et de collants, elles jonglent avec leurs sentiments, associant profondeur et désinvolture dans un ballet déconcertant. A ne pas manquer.